Gestion des déchets de chantier : un contexte réglementaire favorisant l’économie circulaire
Si la réglementation interdisait d’ores et déjà les pratiques non respectueuses de l’environnement telles que l’enfouissement ou l’incinération des déchets sur chantier, elle s’inscrit désormais dans une démarche ambitieuse visant des taux de valorisation élevés et cherchant à faire baisser le volume des déchets mis en décharge.
En accord avec la Stratégie Nationale Bas Carbone et avec la volonté d’orienter son économie vers le circulaire, le bas carbone et le durable, l’Etat a notamment renforcé en 2020 son engagement par l’intermédiaire de la loi AGEC (loi anti-gaspillage pour une économie circulaire), donnant lieu à plusieurs obligations nouvelles en la matière.
La mention « déchets » dans les devis : depuis le 1er juillet 2021, il est désormais obligatoire d’inscrire dans tous devis de travaux de construction, rénovation et démolition de bâtiments certaines mentions liées à l’activité déchets. Tout entrepreneur réalisant un devis doit dès lors faire figurer, dans un but de sensibilisation du maître d’ouvrage à la question des déchets générés par son chantier, les éléments suivants :
- Une estimation de la quantité totale de déchets générés par l’entreprise de travaux pendant le chantier
- Les modalités de gestion et d’enlèvement de ces déchets et notamment l’effort de tri réalisé sur le chantier et la nature des déchets pour lesquels une collecte séparée est prévue
- Les lieux de collecte prévus pour le dépôt des déchets (déchèteries professionnelles, points de collecte…). Ces derniers devant être identifiés au moyen d’une adresse et d’une raison sociale.
- Une estimation des coûts associés
Par ailleurs, cette mesure s’accompagne de la mise en place d’un bordereau d’un dépôt des déchets, signé conjointement par l’entreprise responsable de la génération des déchets et par l’agent les ayant réceptionnés. Remis par la suite au maître d’ouvrage, il doit notamment contenir :
- Le type/ nature des déchets
- Le lieu du chantier
- Les informations légales du maître d’ouvrage
- La quantité/ volume des différents déchets
- Les informations légales de l’installation de collecte
- La date du dépôt
Son délai de conservation est d’une durée minimale de 3 ans, ce afin de pouvoir le présenter en cas de contrôle.
À noter que le Ministère de la Transition Écologique met à disposition une application numérique gratuite, Track Déchets, afin de simplifier la traçabilité des déchets en temps réel et d’apporter de la transparence et de la fiabilité dans la filière déchets.
Le diagnostic PEMD : à compter du 1er janvier 2022, il est obligatoire pour le maître d’ouvrage, dans le cadre d’une démolition ou d’une rénovation significative, de réaliser un diagnostic portant sur la gestion des produits, matériaux et des déchets issus des bâtiments. Ce diagnostic a notamment pour objectif de recenser et estimer la nature, la quantité et la localisation des différents produits, équipements, matériaux et déchets présents sur l’opération et ainsi en déterminer le potentiel de réemploi, de recyclage ou de valorisation des déchets.
Qu’entend-on par démolition ou rénovation significative ?
- Les bâtiments dont la surface cumulée de plancher est supérieure à 1 000 m2 (ensemble de bâtiments à l'échelle de l'opération)
- Ou ayant hébergé une ou plusieurs substances dangereuses (article R4411-6 du code du travail)
Le diagnostic doit être réalisé en amont du dépôt des demandes d'autorisation d'urbanisme (construction, démolition, aménagement) ou, à défaut, avant l'acceptation des devis ou la passation des marchés.
La gestion des déchets en cours de chantier
Tri 7 flux : si depuis 2016 l’obligation de trier à la source portait sur cinq typologies de déchets (tri 5 flux), ce sont désormais 7 flux qui doivent être pris en compte sur les chantiers. En effet, le décret n°2021-950, entré en vigueur le 16 juillet 2021, vient enrichir cette obligation de tri en ajoutant 2 flux supplémentaires :
- Les déchets de fraction minérale (béton, briques, tuiles, céramiques ou pierres)
- Les déchets de plâtre (plaques de plâtre, cloisons alvéolaires, dalles ou carreaux de plâtre).
Ces deux nouveaux flux s’ajoutent donc aux 5 premiers flux initiaux, à savoir :
- Les papiers et les cartons
- Les métaux
- Les plastiques
- Les verres
- Les bois
À noter qu’il existe deux types de dérogations à cette obligation, une dérogation partielle et une dérogation totale.
La dérogation partielle permet à une entreprise de mélanger 6 des 7 flux si la capacité de ces derniers à faire l’objet d’une préparation de valorisation n’est pas affectée et que cette valorisation possède la même efficacité que si elle avait été effectuée lors d’une collecte séparée. Néanmoins, le plâtre doit toujours être trié séparément car il empêche toute valorisation possible des autres matériaux lors d’un mélange. Il est également obligatoire de trier à part des autres déchets les déchets dangereux (hors amiante) et les déchets d’amiante.
Quant à elle, la dérogation totale peut s’appliquer si le chantier ne permet pas d'affecter une surface de 40m2 ou plus au stockage de déchets (hors surfaces de voirie publique) ou s’il produit peu de déchets (moins de 10m3 de déchets, tous déchets confondus sur l'ensemble de sa durée).
REP bâtiment : prévue pour une mise en application au 1er janvier 2022 finalement reportée d’un an au 1er janvier 2023 afin de permettre à la filière de s’organiser, la Responsabilité Élargie des Producteurs (REP) de la filière Bâtiment est un véritable outil de structuration de la filière déchets en France et vise – entre autres objectifs – à mettre fin aux déchèteries sauvages et à favoriser le réemploi et le recyclage des matériaux de construction.
Le principe de la REP ? Faire financer la gestion des déchets issus de leurs produits par les fabricants de matériaux selon la méthode « pollueur-payeur ». Ainsi, le coût de collecte et de traitement des déchets sera répercuté dans le prix de vente des produits à travers une éco-contribution et finançant des éco-organismes chargés de collecter et valoriser les déchets.
Elle permettra alors une reprise gratuite de ses déchets, à conditions de les avoir triés, et devrait donner un coup d’accélérateur à l’activité de tri à la source.