Cas pratique : une réparation impossible ?

En 2005, après l’apparition d’importantes fissures au niveau des garages, du local technique et du sous-sol reliant les deux chalets, le propriétaire demande une expertise de son logement.

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Pour vous faire partager ce qu’est le travail de nos gestionnaires dans le traitement des sinistres qui nous sont déclarés, nous vous proposons une nouvelle rubrique qui vous permettra de vous plonger concrètement dans un dossier d’indemnisation. Vous pourrez ainsi appréhender des situations parfois peu banales que nos collaborateurs doivent traiter pour accompagner nos sociétaires.

Aujourd‘hui, nous vous présentons un dossier atypique concernant un ensemble de deux chalets situés à Méribel, sur lesquels nos sociétaires sont intervenus, l’un pour les travaux de terrassement, l’autre pour l’exécution du gros-œuvre.

Premiers désordres

Ces deux chalets ont été construits en 2000. Ils sont reliés entre eux par une partie centrale composée de garages et d’une piscine.

En 2005, après l’apparition d’importantes fissures au niveau des garages, du local technique et du sous-sol reliant les deux chalets, un premier expert judiciaire, désigné à la demande des maîtres d’ouvrage, préconise dans son rapport des réparations en deux temps :

  1. Un dispositif par poutre tirantée visant à reprendre les efforts horizontaux ;
  2. Et, si nécessaire, un dispositif par micropieux visant à reprendre les efforts verticaux.
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Suite à ce rapport, le tribunal de Grande Instance d’Albertville a retenu la responsabilité de nos sociétaires – aux côtés du maître d’œuvre de conception et du maître d’œuvre d’exécution – et les a condamnés à payer aux maîtres d’ouvrage la somme principale de 380 892 €. Le montant de l’indemnisation sera fixé à 421 000 € par arrêt de la cour d’appel de Chambéry en 2014.

Nouveaux désordres

Malgré la réalisation de la première phase de travaux, les fissures existantes s’élargissent et de nouvelles apparaissent en 2014. Le maître d’œuvre chargé du suivi des travaux de réparation suspend alors la réalisation de la seconde phase de travaux, et les maîtres d’ouvrage saisissent à nouveau le tribunal aux fins d’expertise. Le second expert judiciaire, alarmé par l’évolution des désordres, demande des investigations longues et complexes qui couteront 300 000 € et dureront cinq ans.

Sondages, essais de forage, relevés topométriques et analyse structurelle du bâtiment lui permettront de conclure en 2020 que la poursuite du phénomène de fissuration est consécutif à un glissement de terrain profond (entre 12 et 15 mètres !) et surtout incompatible avec la présence d’une construction.

La défense de nos sociétaires

Dans cette affaire, l’expert judiciaire a retenu la répartition des responsabilités suivante :

  1. À titre principal, la responsabilité du bureau d’études géotechniques (épargné par la première expertise) pour défaut d’analyse et de conseil,
  2. À titre secondaire, la responsabilité des deux maîtres d’œuvre (conception et exécution).

Les arguments de l’Auxiliaire en faveur de nos sociétaires ont été entendus : leur responsabilité doit être écartée en raison de l’absence de tout lien de causalité entre les travaux qu’ils ont réalisés et les désordres survenus.

Les maîtres d’ouvrage, conscients qu’ils devront abandonner leur chalet sans possibilité de le reconstruire, ont récemment demandé au tribunal de condamner l’ensemble des défendeurs à leur payer la somme de 3,8 millions d’euros en réparation de leurs différents préjudices. Cependant et parce que nous pensons que la responsabilité de nos sociétaires doit être écartée, nous envisageons d’obtenir la restitution des sommes mises à notre charge par l’arrêt de la cour d’appel de Chambéry du 11 février 2014.


En conclusion

La garantie décennale du constructeur est une responsabilité de plein droit qui suppose que les désordres soient imputables à l’intervention du constructeur (même si l’origine des désordres reste inconnue) : le maître d’ouvrage doit au minimum apporter la preuve d’un lien de causalité entre le dommage et l’intervention du constructeur, qu’il s’agisse d’une action ou d’une omission, fautive ou non.

En l’espèce, les travaux réalisés par nos sociétaires sont sans lien avec les désordres qui sont dus aux caractéristiques géotechniques du terrain auxquelles ni le géotechnicien ni les maîtres d’œuvre - et ils ont en cela manqué à leurs obligations - n’ont su adapter le projet. Les constructeurs sont en effet responsables des vices pouvant affecter le sol sur lequel l’ouvrage est réalisé, et cette responsabilité est souvent retenue à l’encontre des maîtres d’œuvre et des techniciens spécialisés qui se voient reprocher un défaut de conseil.

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